Olli - Chapitre 7

7. Ça ne va plus

C'était déjà trop tard (ou trop tôt) pour aller au lit. Mais j'allai quand même dans ma chambre pour me laver et me chercher une chemise fraîche. Lorsque je passai devant la cuisine de Madame Wamshüter, elle sortit la tête et dit :
"Ah, on aime ça! Le jeune homme reste loin toute la nuit! Nous ne voulons pas une chose pareille. Ceci est une maison propre, ici habitent des gens corrects!"
Je ne répondis pas. Qu'est-ce que je voulais lui dire?
Le travail me semblait, ce jour-là, particulièrement difficile. J'étais fatigué, mes yeux brûlaient, j'avais des maux de tête et j'avais toujours froid. Lorsque les premières personnes arrivèrent pour le repas de midi, le cuisinier dit: "Eh, Olli, apporte-moi la casserole avec les pommes de terre du local de réfrigération!"
Nous avions pelé les pommes de terre la veille, à présent, elles étaient dans une grande casserole, dans de l'eau salée. J'allai dans le local de réfrigération et essayai de soulever la casserole. Elle était très lourde. La veille, deux d'entre nous avaient porté la casserole dans le local de réfrigération. Et ça n'avait pas été simple non plus. Mais je ne voulais pas dire au cuisinier que c'était trop lourd pour moi. Je soulevai la casserole et vacillai avec au-dehors du local de réfrigération. Tout à coup, tout devint sombre devant mes yeux. Je me sentais, comme si je tombais en bas d'un escalier, dans un trou noir. Il y eut une forte détonation de métal, puis tout était silencieux.
Lorsque je revins à moi, j'étais assis dans un coin de la cuisine sur le sol qui était complètement sous l'eau. Dans l'eau nageaient encore les pommes de terre jaunes. A côté de moi était accroupie Öslem, la femme de ménage turque et m'essuyait le visage avec un chiffon froid. Comme de très loin, j'entendais monsieur Wamshüter hurler:
"Mais mon Dieu, qu'est-ce qui se passe maintenant? Eh Olli, ne t'assied pas comme un flemmard, nettoie cette saleté! Est-ce que c'est possible? Le flemmard reste loin toute la nuit, ma femme se fait des soucis mais il ne dit même pas 'bonjour', ça, le jeune homme n'en a pas besoin. Et maintenant, notre cher Olli de l'est est fatigué et me met la cuisine sous l'eau. Qu'est-ce que je sers à mes invités maintenant? Je peux jeter les pommes de terre. Mon Dieu... Le monsieur se plaint qu'il n'apprend rien mais il ne peut même pas aller chercher une casserole de pommes de terre! Oui, ils sont comme ça les gens de l'est. Ils veulent gagner de l'argent comme ceux de l'ouest, avoir de l'assurance sociale comme en Suède mais travailler..."
J'essayais de me lever. Je n'y arrivais pas.
"Ne te laisse pas faire", me chuchota Öslem dans l'oreille. "Il est fou!"
Je me levai. Il me semblait que la cuisine vacillait et je devais d'abord me tenir à Öslem. Mais après, je pus faire quelques pas.
"Mais qu'est-ce qui se passe maintenant?" cria Monsieur Wamshüter. "Où est-ce que tu veux aller nom de Dieu?"
"A la maison", dis-je.
"A la maison? Dormir peut-être? Qu'est-ce que ça signifie? Ça ne va pas ça, aller à la maison au plein milieu de la journée! Si chacun faisait ça!"
"Je veux rentrer à la maison. Vraiment à la maison. A Hohenroda. Je ne reviens pas." J'allai vers la porte. "Je suis désolé pour les pommes de terre", dis-je encore. Puis je partis.

Et avec ça, l'histoire pourrait être terminée. Je retourne à Hohenroda et ce serait prouvé: les gens de l'est ne peuvent pas travailler correctement et feraient mieux de rester là d'où ils viennent.
Mais ce n'est pas si simple que ça et l'histoire n'était pas encore terminée.