Olli - Chapitre 5 - Partie 1

5. Ouest doré

Oui, qu'est-ce qui a été de travers? A vrai dire, presque tout.
Ça commença très bien. Deux ou trois jours après la réunification arriva une lettre de Biene de Bavière : "Olli, tu voulais toujours devenir cuisinier non? Ici, l'hôte du 'Ratskeller' cherche un apprenti. Tu peux certainement y apprendre beaucoup, plus que chez vous à Hohenroda. Mon père connaît bien l'hôte, il parle avec lui et tu peux avoir la place d'apprentissage si tu veux..."
Et comment je voulais! Apprendre dans un vrai restaurant, pas dans une cantine - ça serait sûrement super! Et à l'ouest, où les gens ont plus d'argent et pour cela mangent mieux et où, pour cela, les cuisiniers doivent mieux faire la cuisine! Et il y avait aussi encore Biene. Alors, je fis mes affaires - je n'en avais pas beaucoup, tout rentrait dans un sac de sport - et montai dans le train. Et salut.
Protzau, c'est comme ça que s'appelait la ville où habitait Biene et qui devait maintenant aussi devenir mon chez moi. C'était un long voyage. De Hohenroda à Dresde, changé à Dresde pour Leipzig, changé à Leipzig pour Nuremberg, changé à Nuremberg pour le bus direction Protzau. J'étais en route presque toute la journée. En fin d'après-midi, je descendis du bus avec mon sac de sport à la place du marché de Protzau. Protzau était environ de même taille que Hohenroda. Mais ici, rien n'était cassé ou sale ou brun. Les vieilles maisons de la place du marché avaient toutes du nouveau plâtre coloré - bleu, vert, jaune, rose - comme des maisons de poupées. Les routes étaient toutes comme neuves et étaient nettoyées chaque jour. Partout, il y avait des beaux magasins avec des marchandises chères en provenance du monde entier et des gens avec de l'argent qui faisaient des courses dans ces magasins. C'était comme... à la télévision. Je regardais tout ça avec la bouche ouverte. J'avais mis mes meilleurs habits ; ma veste en jeans, mes nouveaux jeans et les nouvelles baskets, mais ici, je me sentais comme un mendiant. Avec le premier argent, je me disais, tu achètes de nouveaux vêtements. Comme toi tu as l'air, Biene doit avoir honte si elle sort avec toi.
Mais il n'y eut pas beaucoup d'argent. Et ce n'était pas non plus simple de le gagner, ça je peux vous le dire. Presque chaque jour, je devais travailler dans la cuisine jusqu'à minuit, aussi quand je devais être au centre de formation d'apprentis le lendemain matin à huit heure. Ce qui était encore plus grave: j'ai à peine appris quelque chose. La plupart du temps, on ne servait que des plats finis. Des légumes et de la soupe en boîte. Des frites, des steaks et du poisson surgelés. Des saucisses en plastique et des pizzas de l'emballage. La plupart du temps, je devais faire des travaux durs ou bêtes: nettoyer le four, laver des casseroles et des assiettes sales, apporter des boîtes et des emballages à la cuisine, ouvrir, mettre des frites surgelées dans la friteuse et glisser des pizzas finies dans le four à micro-ondes, peler des pommes de terre, laver de la salade... Après quelques semaines, je me suis plaint auprès de l'hôte du 'Ratskeller', monsieur Wamshüter.
Monsieur Wamshüter me regarda comme si je lui avais volé de l'argent ou quelque chose comme ça. "Mais est-ce que ça existe? Ils sont donc comme ça ceux de l'est. Ils veulent gagner comme les allemands de l'ouest, avoir de l'assurance sociale comme en Suède mais travailler comme dans la DDR!" Nous nous tenions dans la cuisine et monsieur Wamshüter parlait fort pour que touts pouvaient l'entendre - le cuisinier, l'aide cuisinier, la serveuse et la femme de ménage. Quand monsieur Wamshüter n'était pas là, tous se plaignaient du travail dur et les longues heures. Mais maintenant, ils ne disaient rien mais se moquaient de moi avec monsieur Wamshüter. "Gagner comme les allemands de l'ouest, avoir de l'assurance sociale comme en Suède mais travailler comme dans la DDR!" - oui, c'est bien ça. Oui, quand il s'agit de celui de l'est [« Ossi » (ou « Wessi ») est considéré comme une insulte de nos jours], ils sont tous du même avis: il est flemmard, il devrait être content d'avoir le droit de travailler ici, il peut partir si ça ne lui plait pas. Enfin, je pensais, il n'y a qu'une chose - serrer les dents, travailler encore plus dur et leur montrer à tous que nous les gens de l'est pouvons aussi travailler, que leur préjugé débile n'est pas correct.